Le poney landais aujourd'hui

 

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Issu de croisements successifs entre la race pyrénéenne primitive, au profil convexiligne, et les chevaux Arabes (mélange de sang qui a débuté dès les invasions arabes du VIIIe siècle), le Poney Landais s'est adapté, au cours des siècles, à la vie dans les pâturages marécageux des bords de l'Adour (barthes).

Peu avant la Première Guerre mondiale, des éleveurs ont tenté d'améliorer la race primitive par des croisements entre des Barthais et des Arabes.
Très fortement amenuisée et réduite à moins de 200 individus après la Seconde Guerre mondiale, la race a été sauvée grâce à la création d'un livre généalogique, en 1967, et à l'apport de sang de Welsh Pony et d'Arabe.


Morphologie

Le Poney Landais est harmonieux, avec une tête large au niveau des yeux, carrée et relativement fine, sèche et qui porte des petites oreilles pointues.
L'encolure, bien orientée, longue et forte, se fond avec un garrot bien sorti, l'épaule oblique et le poitrail ouvert. Sa taille : de 1,18m à 1,48m.
Son dos est porteur, la croupe est légèrement avalée et les membres sont robustes.
La queue et la crinière sont pour leur part bien fournies.

Les robes admises sont : bai, noir, alezan et chocolat. Balezanes et marques en tête sont autorisées, le gris et le pie ne sont pas admis.


Utilisations

Rustique et endurant, le Poney Landais se dresse facilement et constitue une monture agréable pour le manège, la randonnée et les concours hippiques réservés aux jeunes.Partenaire sportif des enfants, le Poney Landais excelle dans les disciplines olympiques : dressage, saut d'obstacles et concours complets.

C'est, en outre, un remarquable trotteur, aux allures bien relevées, qui s'adapte sans difficulté à l'attelage.

Parfaitement polyvalent, le Poney Landais convient aussi à une utilisation familiale ou pour l'équitation de loisir, la randonnée, le TREC, et s'adapte à tous les modes de vie.

Jongleur, étalon poney Landais (avec son éleveur Monsieur Bacqué)
trotteur de légende dont le record du 100 Km tient toujours !

Pour en savoir plus sur ce merveilleux poney : http://poneylandais.free.fr/

 

Les petits chevaux landais des barthes de l'Adour

Petits chevaux landais des barthes de l'Adour : ce titre, sans l'avoir fait exprès, je le jure est un alexandrin. Je ne le récuse pas et le considère comme un signe. Le souvenir de cette originale et charmante cavalerie que les voyageurs de la ligne Dax-Bayonne remarquent, presque en toute saison, dans les vastes prairies du bord de l'Adour, aux environs de Saubusse, évoque un poétique tableau. Ces prés - des "communaux" pour la plupart - sont appelés des "barthes" dans le pays. Le mot originel serait ibère, ce qui se conçoit en ce Sud-Ouest de la France, qui est la très ancienne Aquitaine ibérique. Il signifierait taillis : taillis de saules et d'aulnes, arbres des lieux humides, sans oublier la végétation complémentaire mêlée à l'osier, joncs, prèles et salicaires, iris de marais dont la gracieuse fleur d'or, ou fleur d'iris jaune, a donné en Ile-de-France la fleur de lys du blason de la province et de ses ducs, devenus ensuite rois de France.
Avec le temps et la culture dirigées de l'homme, la barthe, débroussaillée, est maintenant une prairie rase, dite même barthe à foin. Seuls la quadrillent des fossés d'asséchement dont les talus sont plantés de saules têtards. Lors des inondations, fréquentes en ces pluvieux pays, inondations que la grande marée atlantique accroît en remontant le fleuve aux équinoxes du printemps et de l'automne, on ne voit plus émerger de l'étendue plane des eaux que ces arbres en trochées (Ensemble de rameaux qui repoussent de la souche d'un arbre) des talus, avec l'échevellement de leurs baguettes. Dès que l'inondation baisse et que des îlots de gazon affleurent, le voyageur les peut voir animés de troupeaux d'oies et de canards domestiques ainsi que d'étranges petits chevaux à l'air sauvage. Ces prés immenses, les flaques d'eau reflétant le ciel, la solitude, que cernent seuls des bosquets de carolins et de chênes, un peu au delà les premières terrasses du pays d'Orthez ou de Chalossé, ces chevaux ou plutôt ces poneys antiques, au poil ébouriffé, pacageant de conserve avec la volaille, tout cet ensemble compose un site tranquille et simple, inhabituel, évoquant les primitives époques qui furent, dit-on, l'âge d'or. On le croit sans peine à voir tout ce que nous fait subir depuis un siècle la civilisation (?) industrielle et mercantile.

 

Pour achever l'impression, si le temps n'est point nuageux, une frisée émerveillable, par delà les bois et les coteaux, dans les lointains du Sud-Ouest, une frise aux tons d'églantine ou de rose de Noël festonne l'horizon : les Pyrénées - ces "montagnes-fées, a dit fort justement Michelet - qui nous offrent à leurs sommets "un miracle, une transfiguration constante dans un certain léger bleuâtre, dans l'inexprimable rosé qui passe entre l'aube et l'aurore", mais se prolonge presque tout le jour en hiver lorsque la haute chaîne est poudrée à frimas.

 

Dans les beaux mois du printemps et de l'été, les prairies des barthes, désencombrées des eaux, sont parcourues des oies, que conduisent, avec une superbe inepte, leurs jars, et de troupes de ces poneys landais dont le crayon de M. Léon Fauret, bien connu des lecteurs de l'Illustration, exprime ici le caractère et le charme avec l'exactitude élégante d'un parfait animalier.

L'impression d'antiquité s'accuse lorsqu'on sait que ces petits chevaux d'aspect hirsute et primitif sont sans doute en nos très vieux pays pyrénéens la survivance du cheval quaternaire. M. P. Tillac, observateur et portraitiste de talent (bêtes et gens), nous l'assure dans une étude de la revue basque Gure Herria (c'est-à-dire Notre pays), de septembre-octobre 1934, sur les petits chevaux, ou pottokak (petiots), du pays basque, frères montagnards de ceux des Landes. Il nous donne en référence des dessins de l'homme préhistorique gravés dans la grotte des Eyzies et quelques autres. La ressemblance est saisissante. Mlle Marcelle Richard confirme cette hypothèse en une savante monographie sur les barthes de l'Adour parue dans la Revue géographique des Pyrénées et du Sud-Ouest (fasc. 2 et 3 de 1937).

 

Le crâne de cheval trouvé dans la grotte quaternaire de Brassempouy, entre Orthez et Saint-Sever, ne diffère pas du crâne des poneys landais, dits aussi "race barthaise" : front bombé, chanfrein busqué à la manière du bélier. Ajoutons-y un œil vif au regard méfiant et mal commode qu'ombrent les touffes d'une crinière en broussaille. La taille est petite (1m 10 à 1m 30) ; la robe, foncée et rude ; le ventre ballonné ; la queue, longue ; le jarret, robuste, nerveux et fin. C'est le même poney qu'on trouve au pays basque, en Navarre, en Galice, en Libye, en Bretagne, en Irlande, dans les steppes caspiennes, en Manchourie et en Corée. Ce serait le petit cheval initial dont toutes les races du globe sont issues.

 

D'ailleurs ce petit animal, indépendant, plein de quant-à-soi et qui mord aisément, comme le chat griffe qui lui déplaît ou lui manque d'égards, est surtout élevé aujourd'hui encore dans nos pays pour la reproduction. Rien ne lasse son ardeur ni son tempérament, son "élan vital". Il demeure un sauvage, un rustique qui naît et vit à l'air libre, quelle que soit la saison. Cela ne le gêne point de patauger jusqu'au boulet dans les flaques prairiales de l'automne ou de l'hiver, bien qu'il ne soit nullement pédauque (c'est-à-dire palmipède) comme l'oie, sa commère.
La vie rude double son énergie native. On a vu l'homme faire appel à lui avec succès pour désembourber des canons lourds après échec des percherons ! Il est rare qu'il demande quelque chose à son maître. Il n'accepte de foin que celui qu'on veut bien lui apporter en barque de la métairie où il est inscrit sur les rôles animaux lors des amples inondations qui l'ont isolé sur une bosse de la prairie.
Cela ne veut pas dire qu'il soit misanthrope. Il sait fort bien deviner, avec son instinct aigu d'animal, la crue qui sera catastrophique aux époques équinoxiales et contre laquelle il n'y a rien à faire qu'à s'en aller. Alors il la devance et regagne la métairie où il a séjourné naguère, ne fût-ce que quelques jours. On les voit par groupes cheminer dès lors à la file indienne à travers les flaques qui fluent et s'élargissent sur la barthe. Ils vont vers leur arche de Noé des jours diluviens.
Il est un autre cas où le poney landais gagne de soi-même la métairie. Il prend un jour à la femelle comme la fierté d'aller montrer au maître - après une méticuleuse et tendre toilette - le poulain qu'elle a mis bas toute seule sur la prairie. La présentation achevée, qu'un peu de foin sec a récompensée, elle rejoint avec son petit la solitude éventée et fraîche, qu'elle préfère à tout le confort domestique. Humeur de solitaire ou de louve.
Cependant, malgré ces goûts, l'animal est si peu misanthrope qu'il se laisse fort bien dresser par le chasseur d'oiseaux aquatiques : poules d'eau, sarcelles, vanneaux, outardes et canards sauvages, voire héron hurluberlu ! Il laisse l'homme, masqué par lui, approcher le gibier d'eau ; il va, docile à sa pression. Les oiseaux, accoutumés à ce quadrupède, hôte invétéré de ces solitudes, se méfient de telle ruse moins encore que du cheval de bois des Grecs les malheureux habitants d'Ilion !...
Le poney s'adapte si bien aux besoins de l'homme qu'il fait le service du transporteur de légumes à la ville, et plus volontiers encore, peut-on croire, celui des jeunes filles qui souhaitent un gentil animal à leur charrette d'osier ou à leur "tonneau".

Services divers qui furent négligés naguère à cause des autos et des autobus. Mais le primitif, l'élémentaire a recouvré son empire en ces tout dernier temps. Le poney landais est en train d'en bénéficier, et à quelle allure ! De deux cents cinquante qu'ils étaient dans les barthes de Saubusse vers 1930, leur troupeau pacager était tombé à cent vers 1936. Le prix du poulain d'un an était tombé, lui aussi, de 1 000 francs environ à 80 francs ! Aujourd'hui, de toute manière, la revanche est venue : ce petit animal primitif et vivace devient sans prix, ce qui en tout pays signifie fort cher.

Pour le poète, c'est aussi une revanche de penser revoir toujours sur le gazon des barthes émaillé de flaques d'eau et dominé au loin par la montagne bleuâtre ou rosée ces petits chevaux demeurées antiques et libres, dont nos ancêtres des cavernes ou des lagunes firent leur première, sinon leur plus belle conquête.

François Duhourcau